Cérémonie du 65ème anniversaire de la victoire contre le nazisme

Henri Emmanuelli retenu par ailleurs m’a demandé de le représenter lors de cette cérémonie du 65ème anniversaire de la victoire contre le nazisme, et il me charge de vous transmettre tout son respect et toute sa sympathie.

Soixante cinq ans déjà…le temps inexorablement poursuit sa marche impitoyable. Et il n’y a guère cruauté de dire que, à l’instar de Lazare PONTICELLI pour la guerre de 14-18, les souvenirs nous quittent peu à peu pour entrer de plain pied dans la seule mémoire de l’histoire.

Comme beaucoup ici, je fais partie de ces générations qui n’ont connu la guerre que par les récits, les témoignages, les livres, les articles des anciens combattants et des résistants. J’en ressens bien sur de très forts sentiments où se mêlent l’horreur, le dégoût, et puis finalement l’admiration, la compassion et enfin l’émotion de connaître mon pays tel qu’il est et doit tellement à ses anciens combattants et résistants. Après les innombrables morts de la guerre de 14, la guerre de 40 a ajouté d’autres morts pour la France. Elle a, en plus, à travers le nazisme, véhiculé une idéologie nauséabonde dans laquelle s’enchevêtrent l’antisémitisme, l’exclusion, le racisme, et provoqué déportations, camps d’extermination, exécutions. Il vous en a fallu du courage pour résister à ce terrifiant char d’assaut de l’ignominie !

Alors, avec vous tous, comme nous tous, je n’accepte pas que certains aujourd’hui sèment le doute et contestent la terrible réalité.

Inlassablement, parmi vous, il en est qui témoignent encore et encore un peu partout, surtout dans les écoles, pour que l’on sache et prenne conscience. Comment ne pas prendre conscience, lorsqu’un jour une vieille dame face à une classe, sortit d’un petit sac une robe sans forme : « c’était la robe que je portais au camp, elle était faite avec les cheveux des prisonnières ! » Un frisson parcourut la classe.

Inlassablement, vous, les adhérents de l’ANACR, par vos livres, vos travaux d’historiens, faites revivre ces pages sombres de l’histoire. Sans doute pensez-vous comme Georges FABAS : « lorsque je revis ces heures dramatiques, et que je revois les visages de ces martyrs, mes frères, je me considère encore aujourd’hui comme un miraculé ayant une lourde charge à assumer, celle de garantir pour les générations futures la mémoire de leur sacrifice suprême ».

« La côte landaise et le terrain d’aviation de Mont-de-Marsan ont constitué des lieux stratégiques pour l’armée d’occupation allemande. Rapidement, la Résistance s’est constituée dans un département soumis aux privations. Le courage et la discrétion de la population landaise, la détermination des Résistants, ont largement contribué à la Libération » écrivent Delphine COSTEDOAT et Stéphane DELBÈS dans une publication réalisée avec le soutien du Conseil Général des Landes.

Et c’est vrai que nombreux ont été les faits d’armes dans les Landes. De nombreuses publications initiées par l’ANACR en sont un précieux témoignage. Je ne me risquerai pas à m’en faire le relais tant chacun de ces faits mérite une stricte vérité historique. J’en ferai pourtant l’éloge avec émotion et reconnaissance.

Dans de nombreuses villes et communes des Landes, beaucoup de rues portent le nom de ces héros de la liberté : Rue Jean LABASTIE ou Stade René DICHARRY à ONDRES , rue Georges LASSALLE à BOUCAU et TARNOS, rue Maurice PERSE au BOUCAU, notre région n’a pas failli à ses devoirs.

Ici, à TARNOS , ce sont les écoles qui portent le nom de résistants : André DUBOY, Jean MOUCHET, Félix CONCARRET. Un hommage fort, pour continuer leur combat par la pédagogie.

Car aujourd’hui que le sang et les larmes se sont asséchés au fil du temps qui passe, le moment de la pédagogie, de l’enseignement, reste plus que jamais d’actualité.

Le temps de ces quelques mots et parmi la somme de tous les enseignements ce sont deux leçons que je voudrais retenir.

Lorsque DALADIER s’en revint de Munich où il avait signé les fameux accords, il prononça à Paris un discours devant une foule qui l’acclamait à tout rompre. Alors, nous dit-on, il murmura dans sa barbe : « les pauvres, s’ils savaient ! » Toujours, le peuple doit savoir, sinon le pire est à craindre…et qu’il n’attende pas qu’on l’informe ; en toutes circonstances c’est le peuple qui a un devoir de vigilance, car au bout de tout, le pouvoir lui appartient. Le peuple allemand a-t-il été vigilant, lorsqu’il élisait HITLER en 1933 par les voies démocratiques ? A l’école, cela s’appelle l’Education Civique…c’est elle qui doit régir notre vie collective.

Autre leçon, c’est la terrible instabilité du temps. Que l’on se souvienne….1936 et ses congés payés, la folle allégresse du monde du travail, 1939, la terrible déflagration. Trois ans pour passer de la joie, de la fête, du bonheur, à l’apocalypse !

Il n’y a plus de guerre aujourd’hui pour la France…Je voudrais pourtant que les français sachent ne dormir que d’un oeil, car si le pire n’est jamais sûr, il reste à tout moment possible.

Je voudrais enfin trouver un troisième enseignement. Leur courage, leur sacrifice, doit être pour nous une formidable leçon d’espoir. Lorsque le pire arrive, il existe toujours des femmes et des hommes qui se lèvent pour, au risque de leur vie, dire NON. Devant cette abnégation, les mots ont peu de force, alors, respectueusement, humblement, je m’incline et je remercie.

Et puis avec vous tous, je n’oublie pas le prix qu’ils ont payé pour notre liberté.


Lionel Causse - Conseiller Général